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Histoire de l’hôpital et prise en charge des personnes en situation de pauvreté

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[22 novembre 2009] L’histoire de l’Hôpital montre une évolution dans sa mission, à l’origine pour l’hébergement charitable du pauvre, il a fini par assurer la prise en charge médicale des malades dans le cadre d’un service public hospitalier.

Pour rappel, les premiers hôpitaux n’étaient pas destinés aux malades mais à l’hébergement des pauvres. En effet, au Moyen Âge, les hôpitaux sont fondés par l’Église selon les préceptes religieux tels charité et accueil. La notion centrale est la gratuité, les structures sont construites pour les personnes les plus indigentes. A noter qu’ils étaient alors pour la plupart construits en dehors des villes, sans vocation médicale.
Au XVIIe siècle, la pauvreté devient un problème politique et l’Etat s’en empare. Sont alors créés des hôpitaux pour « recueillir » les sans logis, les mendiants, les exclus…Cependant, ils restaient des lieux d’enfermement des pauvres, des marginaux, et des « fous ». Des auteurs de l’époque ont pu parler d’un « grand enfermement ». La création de l’hôpital général à Paris, puis dans chaque grande ville française, en est l’exemple.
Les révolutionnaires voyaient donc l’hôpital comme la pire des institutions de l’Ancien régime. Souhaitant un grand système d’assistance généralisée, ils ont opté pour un système décentralisé dans lequel l’hôpital est rattaché à la commune (loi du 16 octobre 1796).

A partir de la moitié du XIXe siècle, la législation va s’attacher à transformer l’hôpital en renforçant sa mission médicale. La loi du 7 août 1851 dite « d’assistance publique » pose les prémices du service public hospitalier actuel en énonçant « lorsqu’un individu privé de ressources tombe malade dans une commune, aucune condition de domicile ne peut être exigée pour son admission à l’hôpital existant dans la commune ». La loi du 14 juillet 1905 sur les vieillards, les infirmes et les incurables donne à tout français privé de ressources, incapable de subvenir par son travail aux nécessités d’existence, âgé de plus de 70 ans ou ayant une maladie incurable, d’être accueilli gratuitement dans les hôpitaux ou les hospices. Un autre texte fondamental est la loi du 21 décembre 1941 relative aux hôpitaux et hospices publics (et son décret d’application 43-891 du 17 avril 1943) qui ouvre l’hôpital à toute la population mais qui institue un prix à la journée d’hospitalisation.

La seconde évolution était l’œuvre de la « réforme Debré » menée par le premier ministre de l’époque Michel Debré et inspirée par le Professeur Robert Debré. Cette réforme s’appuyait sur l’ordonnance 58-1373 du 30 décembre 1958, portant création de centres hospitaliers et universitaires (CHU), réforme de l’enseignement médical et développement de la recherche médicale, et sur la loi 59-1557 du 31 décembre 1959 sur les rapports entre l’État et les établissements d’enseignement privés. L’ordonnance énonçait dans son article premier : « Dans les villes sièges de facultés de médecine, de facultés mixtes de médecine et de pharmacie ou d’écoles nationales de médecines et de pharmacie, les facultés ou écoles et les centres hospitaliers organisent conjointement l’ensemble de leurs services en centres de soins, d’enseignement et de recherche, conformément aux dispositions de la présente ordonnance. Ces centres prennent le nom de « centres hospitaliers et universitaires ». L’idée centrale était qu’une partie du personnel médical des hôpitaux universitaires devait être conduite à devenir temps plein, et à partager ce temps entre les soins, l’enseignement et la recherche. Les hôpitaux devenaient des lieux de pratique professionnelle et de recherche, réunissant praticiens et universitaires. L’hôpital devient alors un pôle d’excellence médicale. Cette forme d’élitisme conduit à quelque peu oublier les pauvres.

Il faut alors attendre la loi 91-748 du 31 juillet 1991, dite de « réforme hospitalière », pour qu’il y ait un rappel de la mission de service public des hôpitaux.
Cette loi insérait dans le chapitre Ier du titre Ier du livre VII du code de la santé publique, une section 2 intitulée « Dispositions propres au service public hospitalier », dont l’article L. 711-3 énonçait alors « Le service public hospitalier exerce les missions définies à l’article L. 711-1 et, de plus, concourt : A l’enseignement universitaire et postuniversitaire et à la recherche de type médical, odontologique et pharmaceutique […], à la formation continue des praticiens hospitaliers et non hospitaliers, à la recherche médicale, odontologique et pharmaceutique, à la formation initiale et continue des sages-femmes et du personnel paramédical, aux actions de médecine préventive et d’éducation pour la santé, à l’aide médicale urgente […] ».
Cette loi insérait également un article L. 711-4 énonçant : « Le service public hospitalier est assuré : par les établissements publics de santé ; par ceux des établissements de santé privés qui répondent aux conditions fixées aux articles L. 715-6 et L. 715-10 », et précisant « Ces établissements garantissent l’égal accès de tous aux soins qu’ils dispensent. Ils sont ouverts à toutes les personnes dont l’état requiert leurs services. Ils doivent être en mesure de les accueillir de jour et de nuit, éventuellement en urgence, ou d’assurer leur admission dans un autre établissement mentionné au premier alinéa », « Ils dispensent aux patients les soins préventifs, curatifs ou palliatifs que requiert leur état et veillent à la continuité de ces soins, à l’issue de leur admission ou de leur hébergement » et « Ils ne peuvent établir aucune discrimination entre les malades en ce qui concerne les soins. Ils ne peuvent organiser des régimes d’hébergement différents selon la volonté exprimée par les malades que dans les limites et selon les modalités prévues par les textes législatifs et réglementaires en vigueur ».