Le site du CNLE

> Accueil > Actualités > Brèves > Etienne Pinte reçu dans l’ordre de la Légion d’honneur

Etienne Pinte reçu dans l’ordre de la Légion d’honneur

Imprimer cette page

[17 septembre 2014]

Étienne Pinte, président depuis juillet 2010 du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CNLE), s’est vu remettre les insignes de chevalier de la Légion d’honneur, vendredi 5 septembre 2014, au petit hôtel du Palais Bourbon, à l’Assemblée nationale. Cette décoration lui a été remise par Pierre Servent, écrivain, colonel et officier de la Légion d’honneur.

Cette réception dans l’ordre de la Légion d’honneur vient reconnaître l’engagement indéfectible d’Étienne Pinte pendant plus de cinquante années passées au service des Hommes, et plus particulièrement des plus fragiles et des plus démunis.

En s’adressant à l’assemblée nombreuse de parents, amis, anciens collaborateurs, hommes et femmes politiques et membres du CNLE, Étienne Pinte est revenu notamment sur ses fonctions de député des Yvelines, de maire de Versailles, et sur le souvenir qu’il garde de nombreuses autres missions.

Discours d’Étienne Pinte

« Donner un sens à sa vie, c’est s’engager et, pour moi, c’est se mettre au service des autres, telle fut la ligne directrice, le fil conducteur de toute mon existence.

Jamais, il y a près de soixante-dix ans, je n’aurais imaginé qu’un jour je représenterai le peuple français comme élu de la nation et que je légifèrerai au nom du peuple français. Ce qui nous réunit aujourd’hui, la remise de la Légion d’honneur, est en quelque sorte le couronnement de plus de cinquante années au service des Hommes.

L’Homme a toujours été au centre de ma vie. Je ne peux pas vivre une journée sans être imprégné de cette parole de Jean Vanier, le fondateur de l’Arche, "Tout Homme est une histoire sacrée".

Réfugiés avec mes parents pendant la guerre dans ce qui s’appelait à l’époque les Basses Pyrénées, aujourd’hui les Pyrénées Atlantiques, nous avons été, mes frères et moi, confiés à une famille de républicains espagnols, eux-mêmes réfugiés en France au moment de la guerre d’Espagne de 1936, lorsque nos parents étaient poursuivis par la Gestapo pour faits de résistance. Mon parcours et mes engagements ont toujours été marqués par cette première période de ma vie.

Vous comprendrez donc mieux les raisons de mon combat permanent, quotidien en faveur de la défense des étrangers, des demandeurs d’asile, des réfugiés, des sans-papiers. Pierre a rappelé notre expédition dans l’ex-URSS pour soutenir les refuzniks et leur obtenir des visas afin de rejoindre les pays des libertés. Nous avons eu la chance, le bonheur de rencontrer des familles extraordinaires, le professeur Meimann, la famille Shapiro, Ida Nudel, la mère des refuzniks, et bien d’autres encore. Cinq ans après nos rencontres, en 1990, ils ont réalisé leur rêve : "L’année prochaine à Jérusalem".

A partir de cette période, le législateur que j’étais s’est farouchement battu à l’Assemblée nationale, quelles que soient les majorités au pouvoir, contre toute remise en cause du devenir de nos concitoyens d’origine étrangère. Les combats furent rudes, âpres, sans concession. C’était une question de dignité, d’honneur, de respect.

Il fallait non seulement batailler à l’Assemblée nationale mais aussi montrer l’exemple à titre personnel. Il fallait cheminer en tant que chrétien, accompagné par cet appel : "J’étais un étranger et tu m’as accueilli". Avec ma femme et mes enfants, notre maison fut ouverte aux boat-people, aux réfugiés libanais. Nous accompagnons aujourd’hui nos amis chrétiens d’Alep qui sont parmi nous cet après-midi, et je remercie le Père Gollnisch, responsable de l’Œuvre d’Orient, d’être parmi nous. Je n’oublie pas nos amis tunisiens qui m’ont fait l’honneur de les conseiller dans leur passage de la dictature à la démocratie. Enfin, j’ai une pensée particulière pour le docteur Oberlin et son équipe de médecins que j’ai aidés depuis plusieurs années à se rendre à Gaza pour soigner et former des médecins gazaouis.

Un autre grand moment de notre vie, fut notre séjour au Japon. Très attirés par l’Asie, nous avons eu la chance de vivre au Japon où le gouvernement de l’époque m’avait demandé de créer notre représentation du tourisme au Pays du Soleil levant. Découverte d’une civilisation, d’une histoire, d’un mode de pensée et d’action aux antipodes de nos pratiques occidentales, ce fut une étape marquante dans nos vies. Dans les années 70, à l’époque où les Français ne s’exportaient pas beaucoup, sur 1 100 de nos compatriotes inscrits au consulat, il y avait 600 religieux, c’est vous dire l’immersion que nous avons vécue. J’ai été subjugué par les méthodes participatives japonaises pour la réalisation de leurs projets, de leurs chantiers, de leurs créations. Alors que chez nous, nous prenons souvent très rapidement des décisions qui mettent beaucoup de temps à être mises en œuvre, au Japon, aucune décision n’est prise si l’ensemble de la hiérarchie, du PDG au personnel de service, n’a pas été consulté. En d’autres termes, toute décision est le fruit d’une participation collective, et si le résultat est positif, la réalisation est très rapide car elle est le fruit d’une très large consultation et d’une concertation très élaborée.

Quelle leçon de pouvoir pour la première fois de notre vie regarder notre pays avec recul, avec plus de hauteur, avec plus d’objectivité et, j’ajoute, avec plus de lucidité. Cette expérience a été enrichissante et pleine d’enseignements lorsque je suis devenu député. Je n’ai malheureusement pas le temps de vous faire partager mon admiration pour l’art japonais, ses porcelaines, ses estampes d’Hokusaï, ses netsukes, ses bagues, ses jardins, ses temples, ses offices religieux.

Nous sommes retournés, Marie-Noëlle et moi-même, au Japon que nous aimons beaucoup, et je suis heureux que certains de nos enfants et petits-enfants partagent cette attirance. Nous nous y sommes fait des amis, dont certains sont ici.

Pierre a rappelé quelques temps forts de ma vie de parlementaire. Oui, j’ai été à peu près sans discontinuité à la Commission des Affaires sociales pour répondre à ma vocation. Oui, j’ai été heureux de voter l’abolition de la peine de mort. Oui, j’ai été l’un des fers de lance du manifeste "Osons la famille". Oui, j’ai soutenu les intermittents du spectacle, essentiels à la vie culturelle de nos cités. Oui, j’ai proposé au gouvernement, à sa demande en 2008, des solutions pour loger les plus modestes de nos concitoyens. Oui, j’ai participé à la conférence de consensus pour proposer au gouvernement des mesures destinées à lutter contre la récidive, et je remercie Nicole Maestracci, membre du Conseil Constitutionnel, d’avoir été la cheville ouvrière de ce projet.

Quant à ma vie municipale, j’ai été heureux d’avoir réalisé des logements sociaux et une pension de famille pour les plus modestes de mes administrés. J’ai été passionné par les responsabilités que j’ai assumées pendant de nombreuses années comme chargé de l’enseignement et de la formation et d’avoir participé à la construction et à la rénovation de beaucoup d’établissements scolaires et universitaires à Versailles. J’ai été heureux, de réaliser, avec mes amis de la communauté musulmane, un lieu de culte leur permettant de prier dans des conditions de dignité et de respect.

Après avoir remis entre les mains des électeurs mes mandats de maire et de député, j’ai embrassé une nouvelle vie, celle de défendre nos concitoyens en situation de précarité comme Président du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale. Avec tous ceux qui luttent contre la pauvreté et l’exclusion sociale, nous essayons, selon la belle formule d’Albert Camus, de réveiller les consciences. Je suis reconnaissant à François Soulage, l’ancien président du Secours Catholique, Pierre-Yves Madignier, le président d’ATD-Quart Monde, Patrick Doutreligne et Christophe Robert de la Fondation Abbé Pierre, Pierre Henry de France Terre d’Asile, Patrick Peugeot de la Cimade, Martin Hirsch, le créateur du Revenu de Solidarité Active, Dominique Balmary, le président de l’UNIOPSS et bien d’autres encore d’être là à mes côtés, à vos côtés.

J’ai été et je suis toujours très heureux d’être au service de nos concitoyens. J’ai été un député heureux même si j’ai vécu des moments de souffrance. J’ai été un maire heureux même si mes administrés ne m’ont pas toujours compris, mais ils m’ont fait confiance.

J’en viens aux remerciements.

Merci à trois personnes qui ont marqué mon parcours d’élu. Alain Peyrefitte, l’homme du "Mal français" et de "Quand la Chine s’éveillera" qui m’a introduit en politique après avoir été son collaborateur. Philippe Séguin, l’homme de la "fracture sociale" qui m’a confié son bébé, comme il disait, le groupe parlementaire France-Tunisie, lui le natif de Tunis, lorsqu’il est devenu président de l’Assemblée nationale. Simone Weil, dont j’ai été le rapporteur de plusieurs de ses textes.

Merci à Pierre d’avoir accepté d’être mon parrain. Outre notre amitié de longue date, sa fonction de spécialiste militaire et son grade de colonel le relient aux quatre générations d’officiers supérieurs et généraux qui m’ont précédé depuis 1813, lorsque Charles Pinte a embrassé la carrière militaire, au premier régiment de Gardes d’Honneur de Napoléon dans la grande Écurie du roi à Versailles. Vous imaginez le retour aux sources lorsque je suis devenu maire de cette ville royale.

Merci à ma femme, Marie-Noëlle, et à mes enfants qui ont dû supporter une vie publique qui n’a pas été un long fleuve tranquille mais qui m’ont tous accompagné et en particulier Delphine, et je n’oublie pas Sandrine et Jean, qui ont été pendant de nombreuses années mes collaborateurs.

Merci enfin à vous tous car je ne serais pas là aujourd’hui si les uns et les autres n’avaient pas été à mes côtés tout au long de ma vie au service des autres. »

* Télécharger le discours d’Étienne Pinte :
Discours LH Etienne Pinte_5/09/2014 (PDF - 148.8 ko)



* Lire la biographie d’Étienne Pinte

* Quelques photos de la cérémonie (droits photos M. Postel et Mme Bortolozzo) :

JPEG - 529.5 ko JPEG - 464.5 ko JPEG - 488.2 ko JPEG - 494.8 ko JPEG - 456.2 ko JPEG - 430.6 ko JPEG - 430.3 ko JPEG - 435.2 ko JPEG - 389.2 ko JPEG - 453.3 ko JPEG - 405.2 ko JPEG - 395.9 ko JPEG - 430.3 ko JPEG - 411.5 ko JPEG - 427.8 ko JPEG - 1.6 Mo JPEG - 1.7 Mo