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22 mars 2016 : Avis du CNLE sur le rapport 2016 du Programme national de réforme

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[18 avril 2016] PNG - 9.8 koDans le cadre de la consultation annuelle du CNLE sur le rapport de suivi du Programme national de réforme de la France, un avis a été adopté le 22 mars 2016 et adressé au Secrétariat général des affaires européennes (SGAE), afin de contribuer à l’enrichissement du rapport.

Le semestre européen

La Commission européenne a publié le 26 février les "Rapports pays 2016", qui analysent la situation économique dans chaque Etat membre et la mise en œuvre des réformes structurelles recommandées par le Conseil de l’UE en juillet dernier. Les rapports pays analysent aussi les déséquilibres macro-économiques à corriger pour les pays qui ont été identifiés dans cette situation – c’est le cas de la France - dans le rapport sur le mécanisme d’alerte publié en novembre.

La consultation du CNLE sur le PNR

Le projet de rapport sur le suivi du Programme national de réforme de la France fait l’objet chaque année d’une consultation du CNLE. Dans ce cadre, le projet de rapport 2016 a été présenté le 14 mars, par Philippe Léglise-Costa, Secrétaire général des affaires européennes (SGAE), aux membres d’un groupe de travail du CNLE, présidé par Christiane Demontès et ayant pour rapporteur Jean-Claude Barbier. Ce dernier a proposé aux membres du CNLE un projet d’avis sur le PNR, adopté le 22 mars et adressé au SGAE qui l’annexera au rapport français transmis à Bruxelles courant avril 2016.

Un avis détaillé sur le projet de rapport 2016

Le CNLE a donc examiné le projet de PNR de la France dans ce double cadre :

  • le suivi de la stratégie « Europe 2020 » ;
  • la procédure de surveillance budgétaire du semestre européen.

Il a émis les principales recommandations et observations suivantes :

- Les objectifs de la Stratégie 2020 avaient fixé au niveau européen un objectif de baisse de 20 millions du nombre des personnes en risque de pauvreté ou d’exclusion sociale, à l’horizon 2020 ; mais l’évolution constatée entre 2010 et 2014 (selon l’indicateur européen AROPE) est une hausse de 4,75 millions... Le CNLE considère que, devant un tel échec, il est urgent de s’interroger sur la réalisation des axes majeurs de la stratégie européenne et de réaffirmer qu’il ne faut surtout pas les abandonner.

- La France présente sur l’indicateur de pauvreté monétaire relative au seuil de 60 % un niveau sensiblement inférieur à la moyenne européenne (en 2013, il est de 14 % pour la France contre 16,6% pour l’indicateur européen). Même si les dispositifs de protection sociale ont permis de contenir la hausse générale de la pauvreté, ils n’ont toutefois pas permis d’éviter la hausse de la grande pauvreté : le nombre de personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté à 50 % s’accroit de 198 000 personnes entre 2010 et 2013, pour un niveau initial de 4,75 millions. L’indicateur d’intensité de la pauvreté passe de 18,9 % en 2010 à 19,8 % en 2013. Il est regrettable que le thème des inégalités et de la fragmentation de la société française ne soit pas présent dans le PNR, notamment concernant l’inégalité croissante entre les jeunes et les catégories plus âgées, ou le faible taux d’emploi des seniors qui n’est mentionné qu’une seule fois. Le rapport, en outre, s’abstient de faire référence au non-recours aux droits sociaux.

- Le CNLE constate l’absence de référence à l’investissement social.
Le rapport présente essentiellement des mesures de rationalisation budgétaire, sans faire apparaitre si et comment elles ont cherché à préserver les investissements publics à caractère social destinés à prévenir la pauvreté et l’exclusion sociale. Le CNLE recommande au gouvernement français d’entreprendre une mesure systématique des dépenses d’investissement social privilégiant la prévention et la lutte contre la pauvreté dans les divers budgets publics afin que leur évolution puisse être préservée, suivie et évaluée dans le cadre de la consolidation de ces budgets. Il recommande aussi que les investissements sociaux destinés à accompagner les publics les plus éloignés de l’emploi soient placés à un niveau de priorité bien plus élevé qu’aujourd’hui.

- Le CNLE s’étonne par ailleurs que la question des migrations ne soit pas abordée en tant que thème spécifique et transversal, alors que cette question est centrale dans les préoccupations durables de la France. Il estime qu’un changement d’échelle concernant l’accueil des réfugiés est à prévoir, appelant dans la durée un effort financier et humain sensiblement plus important qu’aujourd’hui.

- Le PNR n’indique pas l’état actuel du mal-logement et du sans-abrisme : il y a 3,8 millions de mal logés, selon la Fondation Abbé Pierre). Le CNLE considère qu’il faut aller plus loin et développer la mise en place de solutions pérennes (augmentation des aides à la pierre, relance vigoureuse des Prêts locatifs d’aide à l’insertion, création de logements sociaux et de logements privés conventionnés sociaux, garantie des loyers étendue...).

- En matière d’emploi, le CNLE rappelle que, la situation française étant caractérisée par le fait que moins d’un chercheur d’emploi sur deux est indemnisé, l’incitation au travail ne peut servir de critère d’appréciation du système d’indemnisation. L’idée que le principal problème de l’assurance chômage en France serait une question « d’incitations » n’est pas confirmée par les études évaluatives disponibles. Et, pour permettre aux personnes concernées de maintenir leur capacité de participer à la vie sociale et de se présenter sur le marché du travail, il demande de rapprocher la durée moyenne du chômage de la durée moyenne d’indemnisation.

- Le CNLE observe que les mesures prises pour soutenir l’innovation et le développement de l’économie reposent sur des instruments qui excluent le secteur privé non lucratif , et donc une large part de l’économie sociale (tels les crédits d’impôts). L’État gagnerait à financer plus fortement les investissements sociaux dans l’ESS, aux côtés des autres acteurs économiques.

- Le CNLE regrette que le rapport n’accorde pas l’attention nécessaire aux difficultés des non-salariés (dont le taux de pauvreté atteignait 17,9 % en 2013). La Commission européenne devrait examiner en particulier la situation des non-salariés pauvres dans le monde agricole, dont les ressources découlent en partie de l’application de la Politique agricole commune (PAC).


* Lire l’avis du CNLE sur le PNR 2016 de la France :
CNLE Avis PNR 2016 (PDF - 776.4 ko)

* Pour télécharger le rapport sur le PNR 2016, ses chiffres-clés et une synthèse, consulter la brève sur ce site Emmanuel Macron présente le Programme national de réforme 2016 .