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> Accueil > Dossiers thématiques > Santé et précarité > Organisation sanitaire en milieu carcéral, de 1945 à nos jours > 1945 : Les promesses de réforme
[28 octobre 2009] Les prisons d’après-guerre sont surpeuplées, vétustes et manquent de moyens. Dès 1944, la Commission Charpentier sera chargée de réfléchir sur les mesures d’une vaste réforme pénitentiaire et sur la garantie aux détenus d’un suivi social et médico-psychologique.
Dès 1943, des assistantes sociales et des infirmières du Secours National et de la Croix-Rouge tentèrent de rendre plus vivables les conditions d’incarcération en palliant les pénuries alimentaires et vestimentaires, avec la mission particulière, pour les assistantes sociales, de préparer la sortie et la réinsertion du détenu. En effet, les établissements étaient vétustes, surpeuplés (la population carcérale a plus que triplé entre 1939 et 1946) et les finances manquaient. Dans ce contexte, on a multiplié par quatre les effectifs du personnel, mais recruté en urgence, il n’avait pas toujours toutes les compétences nécessaires.
De plus, le suivi psychologique individuel qui existait déjà, assuré par le Service d’anthropologie pénitentiaire, a permis de révéler que nombre d’incarcérés étaient aliénés ou déséquilibrés, et en cela n’avaient pas leur place en prison. Depuis 1930 et la « Loi de défense sociale », ils devaient, sans être déclarés irresponsables, être envoyés dans des établissements appropriés pour y subir des « traitements scientifiques ».
Par arrêté du 9 décembre 1944, une commission présidée par le bâtonnier de l’Ordre des avocats à la Cour d’appel de Paris, Maître Charpentier, est réunie pour fixer les lignes directrices d’une réforme pénitentiaire. Sa réflexion porte sur de nombreux aspects : peine privative de liberté, reclassement social du condamné, traitement infligé, accidents survenus pendant le travail, isolement, répartition des détenus, exécution des peines, libération conditionnelle, formation du personnel pénitentiaire…
Quatorze déclarations de principes seront faites par la Commission. La dixième propose : « Dans tout établissement pénitentiaire doit fonctionner un service social et médico-psychologique ». Ce n’était pas une révolution mais davantage une mesure s’inscrivant dans la continuité du Service d’anthropologie pénitentiaire. Cependant, cette commission initiait une nouvelle considération de la prison, notamment en matière psychiatrique : par la suite, et dès 1950, on a créé deux établissements spécialisés pour recevoir des détenus ayant des troubles mentaux ; on a créé également quatorze annexes psychiatriques dans les maisons d’arrêt, chargées de dépister les troubles mentaux chez les détenus. Cependant, les manques de finances et de personnels ont conduit assez rapidement à la fermeture de la plupart de ces annexes…
Des constats peuvent donc être faits sur les années d’après-guerre : la psychiatrie est aussi mal organisée en prison qu’ailleurs, peu de place à l’intérieur des établissements pénitentiaires pour des tiers extérieurs, une distinction se crée entre les médecins des prisons et les autres, la prison ne reconnait pas un « droit à la santé » ni ne garantit un « accès aux soins », mais des médecins et des infirmiers commencent à remettre tout ceci en cause…